1928. Nina Berberova, arrivée de fraîche date à Paris rencontre le peuple russe de l’immigration. Renault et les usines de carrosserie offrent, sinon le gîte et le couvert, un travail et un lieu de rassemblement à tous des déboussolés, arrachés à leur patrie qui disparaît dans la Révolution et le bolchevisme. L’empire soviétique est né; l’empire tsariste a sombré dans le sang et les désillusions. A Billancourt – loin d’être un havre de paix – il y a moyen de reconstruire une vie et de s’établir dans un quotidien dont le passé fait preuve de présence. Nina Berberova, raconte les plaisirs, les déboires, les liens, les pleurs et les peurs de ceux qu’on nomme souvent « le petit peuple » où dominent, avant tout, les divergences en dépit de l’amalgame créé par Monsieur Renault. Grâce à ces employés – qui ont peu d’autres choix –, qu’il va chercher à leur sortie d’URSS, il augmentera de façon colossale sa fortune jusqu’au démantèlement des usines. Chroniques de Billancourt, comme son nom l’indique, consiste en courts récits, des chroniques, et esquisse la vie, telle qu’elle fut vécue, par les déracinés de l’Histoire. Ainsi, « Le Manuscrit de Billancourt » dont personne ne savait l’existence, et que la mort de l’auteur révéla; « Kolka et Liosenka », deux enfants d’un premier et second mariage qui visitent leur père sans avoir connaissance l’un de l’autre; « Ici on pleure » qui décrit la vie difficile dans cette banlieue parisienne. Nina Berberova, trace ici des portraits comiques, tragiques, loufoques et plein de justesse, d’une écriture économique avec une acuité incisive. Des chroniques à lire en savourant leur drôlerie parfois sans oublier que les moments relatés ont existé.
Nina Berberova, Chroniques de Billancourt, Actes Sud, 1999, 257 pages, 7,70 €