C’est dimanche, il fait beau. Je lis plusieurs articles et celui d’Elen Brig Koridwen, intitulé « L’eau de rose et ses épines » où elle vilipende la littérature sentimentale, m’interpelle particulièrement. En règle générale, j’aime beaucoup ce qu’écrit Elen. Toutefois, j’ai aussi parfois quelques réserves à ce sujet. Voici quelques-unes de mes réflexions sur l’article en question.
Elen écrit : « Comme on ne peut pas tout avoir – une éthique cohérente et un nom d’auteur familier du top Amazon… » Personnellement, je pense que cela est très possible et je vois tout de même certains auteurs du Top 100 d’Amazon pour lesquels j’ai un profond respect. Je crois sincèrement qu’il est toujours dommageable de généraliser.
« Jadis, les lectrices de romance populaire s’y adonnaient en catimini et avaient pleinement conscience de fréquenter là un genre peu littéraire. »
Elen Brig Koridwen n’a très certainement jamais pris le métro aux heures de pointe dans les années 1950-1960 (pour parler du passé) ou si elle l’a fait, elle a oublié d’observer ses co-passagères. Si elle l’avait fait, elle aurait vu que beaucoup de femmes lisaient ces romans dans les transports et certainement pas « en catimini » ou « avaient pleinement conscience de fréquenter là un genre peu littéraire ». Les femmes lisaient ce qui leur plaisaient et ces romans leur apportaient ce qu’elles recherchaient, c’est-à-dire, un moment d’évasion. Ou peut-être la réflexion d’Elen concerne-t-elle des dames à l’éducation supérieure qui se détendent avec un « genre peu littéraire » ? Pour avoir conscience du genre peu ou prou littéraire d’un livre, il faut déjà une certaine éducation littéraire pour faire ce discernement.
« Aujourd’hui, ces dames sont si décomplexées (excellente chose, à première vue !), l’édition s’est si largement convertie à ce créneau juteux, ses auteurs à succès bénéficient d’une notoriété si trompeuse, que d’innombrables adeptes, persuadé (sic) de savourer là une littérature haut de gamme, se laissent imprégner plus que de raison par des avalanches de clichés périmés. »
Pas sûr que ces clichés soient « périmés ». Apparemment, ils ont l’air de fonctionner encore très bien. Quant à ces dames, elles continuent tout simplement de lire les livres qui les attirent. Par ailleurs, la raison pour laquelle la notoriété des auteurs à succès serait « si trompeuse » m’échappe totalement.
« pendant plusieurs décennies, avaient fait la fortune d’Harlequin et consorts » Chère Elen, je suis persuadée que cette phrase peut être mise au présent, genre « qui depuis plusieurs décennies, font… ». Chaque parution d’Harlequin d’un auteur inconnu, rien qu’en France, représente un tirage minimum de 30 000 exemplaires. Sachant que cette maison d’édition est représentée dans le monde entier ou presque, on peut aisément imaginer les profits engrangés. C’est rageant pour les auteurs dans les autres genres qui ne sont édités qu’à 500 ou 1000 exemplaires, c’est vrai ! Sans mettre dans la balance les pauvres auteurs auto-édités !
« les routiers sont assoiffés de gros bleu qui tache. » N’était-ce pas du « gros rouge » qui tache ? Ou bien s’agit-il d’une référence métaphorique au sang bleu de la noblesse, supposément supérieur au sang rouge du peuple ?
« qu’il s’agit bel et bien d’une perversion où la femme est chosifiée, humiliée, maltraitée par un dominateur. » Là, il faut savoir que dans le domaine SM, c’est généralement la femme qui est dans le rôle de dominatrice. Par ailleurs, ce sont toujours des rôles consentis. Ne pas confondre jeux SM et serial killers !
« Les auteurs autoédités n’ont pas tardé à s’engouffrer dans ce marché porteur, à exploiter un filon si juteux qu’ils imitent massivement la production industrielle : comble de cynisme et de vénalité, me semble-t-il, quand on est artisan ! » Mais pourquoi les auteurs auto-édités n’imiteraient-ils pas l’édition traditionnelle en cela, puisque leur but est justement d’équivaloir l’édition traditionnelle ?
« Madame E. L. James a sans doute beaucoup fantasmé, mais jamais rencontré aucun sadique ni victime de sadique, sans quoi elle ne serait pas aussi mal documentée sur la réalité du sado-masochisme. Il lui aurait suffi de lire pour être édifiée ; mais, bien sûr, ce n’était pas son but. » Ne pas confondre jeux SM et serial killers ! N’est-ce pas un peu mépriser E.L. James que de supposer qu’elle ne sait pas de quoi elle parle ? De lui dénigrer d’avoir lu ?
Et enfin, est-ce réellement le souhait de toute femme d’« avoir un métier et gagner sa vie pour ne dépendre de personne. » ? J’en doute fortement, chère Elen.
Bref, un article intéressant d’Elen qui offre sujet à maintes réflexions.
L’eau de rose et ses épines, d’Elen Brig Koridwen sur son blog (à explorer assurément, car de nombreux articles enrichissants).